La Syrie devrait suivre le sillage de l'Irak en annonçant prochainement la victoire sur le groupe jihadiste Etat islamique (EI), dont les combattants sont en fuite ou acculés dans leurs derniers secteurs.
Le Premier ministre irakien Haider al-Abadi a proclamé samedi la "victoire finale" sur l'EI, qui s'était emparé en 2014 du tiers de son pays.
Cible de multiples offensives depuis plus d'un an --en particulier de l'alliance arabo-kurde soutenue par Washington (les Forces démocratiques syriennes)--, le groupe jihadiste a aussi perdu la majeure partie du territoire conquis en Syrie.
Son "califat" autoproclamé en 2014 est en conséquence en lambeaux, et seuls quelques groupes de combattants lancent encore des attaques éphémères ou persistent à rester dans de petites poches où ils sont assiégés.
L'EI ne contrôle plus aucune ville en Syrie et, même si le groupe compte encore des milliers de combattants, des observateurs s'attendent à ce que Damas déclare la victoire finale d'ici la fin de l'année.
Déjà, devançant cette annonce, la Russie, grand alliée militaire du régime de Bachar al-Assad, a affirmé la semaine dernière que le pays était "complètement libéré" de l'EI.
Le président français Emmanuel Macron, dont le pays est engagé dans la coalition antijihadistes conduite par Washington, s'est voulu, lui, un peu plus prudent dimanche: il a estimé que les opérations militaires contre l'EI allaient se poursuivre jusqu'à "mi, fin-février".
Rami Abdel Rahmane, qui dirige l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), a précisé de son côté que l'EI était désormais à la dérive et ses dernières unités livrées à leur sort.
"Il n'y a plus un seul commandement central donnant des ordres. L'EI se réduit à des groupes éparpillés en Syrie", indique M. Rahmane, dont l'ONG dispose d'un vaste réseau de sources à travers le pays.
Les combattants de l'EI sont les plus actifs dans la province de Deir Ezzor, dans l'est du pays, où ils défendent leurs derniers secteurs, qui représentent désormais moins de 10% de la région.
Des centaines de jihadistes s'y trouvent encore. C'est insuffisant pour espérer pouvoir regagner du terrain mais assez pour conserver la capacité à provoquer des dégâts dans des attaques de type guérilla.
Selon M. Abdel Rahmane, 23 membres des forces gouvernementales ont ainsi été tués lundi dans une attaque près de Boukamal, la dernière ville que l'EI contrôlait entièrement avant de s'en faire déloger le mois dernier.
A ce jour, l'EI tient encore 18 villages sur la rive orientale de l'Euphrate, dans la province de Deir Ezzor, selon l'OSDH.
Il contrôle également une petite région dans celle de Hassaké (nord-est), qu'une alliance menée par les Kurdes entend reprendre rapidement.
Les jihadistes ont aussi entre leurs mains des secteurs isolés de la province de Homs (centre), principalement deux poches que le régime espère aussi reprendre bientôt.
L'EI contrôle encore une petite partie de la province de Hama, plus au nord --où ses combattants affrontent un groupe jihadiste rival--et l'organisation maintient une présence dans le camp de réfugiés palestiniens de Yarmouk, à Damas.
Ses combattants y sont toutefois assiégés depuis des années.
Le groupe ultraradical dispose en outre de positions fixes dans deux autres quartiers, dans le sud de la capitale (Hajar al-Aswad et Tadamoun). Dans la province de Deraa (sud), enfin, les membres affiliés à l'EI ont aussi une petite présence.
"Nous allons probablement voir très bientôt la fin de l'EI comme force occupant le terrain mais il continuera d'exister au travers des cellules dormantes", estime M. Abdel Rahmane.
Alors que les forces antijihadistes ont repris du terrain à l'EI ces trois dernières années, des milliers de jihadistes semblent s'être volatilisés dans le désert ou s'être mélangés à la population.
L'EI est redevenu un groupe insurrectionnel qui peut toujours frapper presque n'importe où en Syrie et en Irak par des attentats suicide.
"Il a essayé de maintenir son système de gouvernance dans lequel il exerçait son plein (...) contrôle, mais aujourd'hui il fonctionne comme un groupe insurgé", déclare Aymenn Jawad al-Tamimi, spécialiste des mouvements jihadistes.
Le sort du chef de l'EI, Abou Bakr al-Baghdadi, est inconnu. Le groupe n'a plus un clair centre de pouvoir et sa machine de propagande, jadis redoutable, est aujourd'hui anémique.
"Je suis sûr qu'il y a encore une chaîne de commandement mais l'ensemble de la structure semble moins cohésive qu'avant", estime M. Tamimi.
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