Les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni ont mené samedi des frappes ciblées contre la Syrie pour punir le régime de Bachar al-Assad accusé par Donald Trump d'avoir mené des attaques chimiques "monstrueuses".
Au moment même où le président américain s'exprimait depuis le Maison Blanche, des détonations étaient entendues à Damas, marquant un nouveau chapitre dans ce pays ravagé par une guerre sanglante qui dure depuis sept ans.
"J'ai ordonné aux forces armées des Etats-Unis de lancer des frappes de précision sur des cibles associées aux capacités du dictateur syrien Bachar al-Assad en matière d'armes chimiques", a lancé M. Trump.
"Une opération combinée est désormais en cours avec la France et le Royaume-Uni, nous les remercions tous les deux", a-t-il ajouté.
La défense anti-aérienne syrienne est entrée en action contre "l'agression américaine, britannique et française", a rapporté la télévision d'Etat syrienne.
Le régime syrien a jugé que cette opération militaire constituait une violation "flagrante" du droit international et était "vouée à l'échec".
La Russie, soutien indéfectible du régime de Damas, a vivement réagi par la voix de son ambassadeur aux Etats-Unis, Anatoli Antonov. "Nos mises en garde n'ont pas été entendues", a-t-il estimé, jugeant que ces frappes étaient une "insulte" au président russe Vladimir Poutine.
Selon le général Joe Dunford, chef d'état-major américain, les forces occidentales ont visé samedi à 01H00, trois cibles liées au programme d'armement chimique syrien, l'une près de Damas et les deux autres dans la région de Homs, dans le centre de la Syrie.
Il a précisé qu'aucune autre opération militaire visant la Syrie n'est prévue à ce stade.
Selon lui, les alliés ont pris soin d'éviter de toucher les forces russes, massivement présentes dans le pays, mais que Moscou n'avait pas été averti à l'avance des cibles choisies.
"Il est clair que le régime Assad n'avait pas reçu le message l'an dernier", a déclaré le ministre américain de la défense Jim Mattis, rappelant la frappe américaine d'avril 2017 sur la base militaire d'Al-Chaayrate, près de Homs, après une autre attaque à l'arme chimique imputée à Damas.
"Nous avons été très précis et la réponse était proportionnée, mais, en même temps, ce fut une frappe lourde", a-t-il ajouté, pré&cisant que les forces américaines avaient employé deux fois plus de munitions que l'an dernier.
Aucune perte américaine n'a été rapportée lors de l'opération, selon le Pentagone.
Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), des centres de recherche scientifique, "plusieurs bases militaires" et des locaux de la garde républicaine à Damas et ses environs ont été pris pour cibles.
De Londres, la première ministre britannique Theresa May a affirmé qu'il n'y avait "pas d'alternative à l'usage de la force", assurant que "tous les recours diplomatiques" avaient été explorés, en vain.
Le ministère britannique de la Défense a annoncé avoir frappé, à l'aide de quatre avions de chasse Tornado GR4 de la Royal Air Force, un "complexe militaire" près de Homs, à l'ouest de la Syrie. Il a parlé d'une opération "couronnée de succès".
Depuis Paris, le président français Emmanuel Macron a souligné que les frappes françaises étaient "circonscrites aux capacités du régime syrien permettant la production et l’emploi d’armes chimiques".
"Nous ne pouvons pas tolérer la banalisation de l'emploi d'armes chimiques", a-t-il martelé.
Donald Trump a mis en garde l'Iran et la Russie, qui ont déployé des milliers d'hommes et du matériel pour aider Bachar al-Assad à reconquérir le pays, contre leurs liens avec la Syrie.
M. Trump a exhorté Moscou "à quitter la voie sinistre" du soutien à Bachar al-Assad. Il a affirmé que la Russie avait "trahi ses promesses" de 2013 sur l'élimination des armes chimiques syriennes.
Il a aussi estimé que le sort des pays de la région était entre les mains de leurs habitants et qu'aucune intervention militaire américaine ne pourrait, à elle seule, apporter une "paix durable".
En avril 2017, Donald Trump avait fait bombarder une base militaire syrienne, en riposte à une attaque au gaz sarin imputée au régime, qui avait tué plus de 80 civils à Khan Cheikhoun (nord-ouest).
Cette fois encore, c'est une attaque chimique présumée --le samedi 7 avril à Douma, près de la capitale syrienne-- qui est à l'origine des frappes déclenchées dans la nuit de vendredi à samedi après une mobilisation de la communauté internationale, déjà saisie par l'horreur d'une guerre civile qui a fait plus de 350.000 morts depuis mars 2011.
Le bombardement intervient quelques heures seulement après que le Département d'Etat a assuré avoir "la preuve" de l'utilisation d'armes chimiques par les forces de Bachar al-Assad.
Le président américain avait rapidement adopté une rhétorique belliqueuse après l'attaque, dénonçant dès le lendemain une "attaque chimique insensée", prévenant qu'il faudrait en "payer le prix fort" et pointant du doigt la "responsabilité" de la Russie et de l'Iran soutenant "l'animal Assad".
Le danger est bien là, selon les experts. Russes et Iraniens ont beaucoup d'hommes sur le terrain pour aider Damas à reprendre tout le pays à de multiples groupes rebelles.
La Russie, indéfectible soutien au régime de Bachar al-Assad, a fait usage à douze reprises de son veto en sept ans de conflit sur des projets de résolution au Conseil de sécurité contre la Syrie.
Selon un bilan à mi-mars de l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), qui dispose d'un vaste réseau d'informateurs à travers la Syrie, 106.390 civils ont été tués dont près de 20.000 enfants.
Dans ce pays qui comptait quelque 23 millions d'habitants avant le conflit, environ la moitié de la population a été contrainte de fuir son foyer en raison des combats.
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