Spectaculaire volte-face, trois jours après le crash de l’avion d’Ukrainian Airlines: l’Iran a présenté ses excuses samedi pour avoir abattu le Boeing 737 par « erreur », tout en pointant la responsabilité de l' »aventurisme américain » dans ce drame.
L’Iran regrette « profondément » ce crash, « une grande tragédie et une erreur impardonnable », a déclaré le président iranien Hassan Rohani.
« L’enquête interne des forces armées a conclu que de manière regrettable des missiles lancés par erreur ont provoqué l’écrasement de l’avion ukrainien et la mort de 176 innocents », a-t-il rapporté sur Twitter.
Plus tôt, le ministre des Affaires étrangères iranien avait déjà exprimé « regrets, excuses et condoléances », tout en soulignant que Washington n’était pas étranger à ce drame. Une « erreur humaine en des temps de crise causée par l’aventurisme américain a mené au déastre », a tweeté Mohammad Javad Zarif.
Il faisait allusion à la tension provoquée par l’élimination le 3 janvier du général iranien Qassem Soleimani dans un tir de drone à Bagdad, sur décision du président Donald Trump, avant des tirs de missiles iraniens sur des bases abritant des soldats américains en Irak.
Le premier aveu avait été formulé par les forces armées iraniennes, parlant d’une « erreur humaine », et expliquant que l’appareil a été pris pour un « avion hostile ». « Le responsable » de cette erreur va être traduit « immédiatement » en justice, a ensuite précisé l’état-major.
Le changement de pied est spectaculaire car Téhéran avait jusqu’alors catégoriquement nié la thèse, privilégiée par plusieurs pays, notamment le Canada, selon laquelle l’avion ukrainien aurait été touché par un missile.
« Une chose est sûre, cet avion n’a pas été touché par un missile », affirmait encore vendredi le président de l’Organisation de l’aviation civile iranienne (CAO), Ali Abedzadeh, à la presse.
Sur Twitter, un conseiller du président Hassan Rohani, Hesamodin Ashena, avait exhorté les médias travaillant en persan à l’étranger à ne « pas participer à la guerre psychologique » contre l’Iran dans cette affaire.
Les Etats-Unis estimaient de leur côté que l’appareil avait « probablement » été abattu par un missile iranien, comme l’indiquait le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo.
« Nous avons des informations de sources multiples » qui « indiquent que l’avion a été abattu par un missile sol-air iranien », avait déclaré jeudi le Premier ministre canadien Justin Trudeau. « Ce n’était peut-être pas intentionnel ».
Le vol PS752 de la compagnie Ukraine Airlines International (UAI) s’est écrasé tôt mercredi à l’ouest de Téhéran, très vite après son décollage. Les victimes sont essentiellement des Irano-Canadiens, mais aussi des Afghans, des Britanniques, des Suédois et des Ukrainiens.
Une vidéo d’une vingtaine de secondes, qui montrerait le moment où un missile frappe l’appareil, a été largement diffusée sur les réseaux sociaux. On peut y voir un objet lumineux grimpant rapidement vers le ciel et frappant ce qui semble être un avion.
Alors que les appels à faire la vérité se multipliaient, l’Iran avait promis de mener une enquête « transparente » et de tout faire pour faciliter la tâche des pays comptant des ressortissants dans les victimes, dont l’Ukraine.
Le ministre ukrainien des Affaires étrangères Vadym Prystaïko a souligné que les enquêteurs ukrainiens bénéficiaient de la « coopération entière » de Téhéran. « Nous prévoyons de commencer prochainement la reconstruction des conversations » qui sont enregistrées dans les boîtes noires.
Téhéran – avec qui Ottawa a rompu ses relations en 2012 – a dit aussi attendre l’arrivée d’une équipe canadienne chargée de « s’occuper des affaires relatives aux victimes canadiennes ».
Mais le chef de la diplomatie canadienne a annoncé que l’Iran avait délivré seulement deux visas à la douzaine de représentants canadiens attendus sur son territoire, précisant avoir « espoir qu’on pourra rapidement résoudre le cas des dix autres visas ».
François-Philippe Champagne a également annoncé la création par le Canada d’un groupe de coordination avec l’Ukraine, la Suède, l’Afghanistan et le Royaume-Uni, qui parlera « d’une seule voix » en faveur d’une enquête « complète et transparente » sur les causes du crash.
L’Iran a par ailleurs invité Boeing, le constructeur américain de l’avion, à participer à l’enquête, ainsi que les Américains, les Canadiens, les Français et les Suédois à observer les méthodes de travail suivies par les Iraniens dans cette affaire.
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