Les combattants du groupe Etat islamique (EI) ont commis ce qui s'apparente à un génocide contre la minorité irakienne yézidie, selon un rapport de l'ONU publié jeudi à Genève. Le document dresse une longue liste d'atrocités perpétrées par l'EI et demande de saisir la CPI de ces crimes.
Le rapport, demandé par le Conseil des droits de l'homme, accuse l'EI de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité, commis depuis juin dernier. Les attaques en Irak des djihadistes de l'EI contre la minorité yézidie "pourraient constituer un génocide", selon l'enquête menée sur la base d'entretiens avec plus de cent victimes et témoins.
"Le schéma manifeste des attaques contre les Yézidis démontre l'intention de l'EIIL (Etat islamique en Irak et au Levant, ancien nom de l'EI) de détruire les Yézidis en tant que groupe". Ceci "suggère fortement" que l’EI pourrait avoir perpétré un génocide, affirme le rapport.
Des meurtres, tortures, viols, des conversions forcées, de l'esclavage sexuel et l'enrôlement des enfants, autant de crimes commis par l'EI contre de nombreux groupes ethniques et religieux en Irak. Le rapport dénonce le "traitement brutal" infligé à plusieurs groupes ethniques, dont les chrétiens, turkmènes, sabéens, mandéens, kaka'e, kurdes et chiites.
Le rapport documente le meurtre brutal et délibéré de centaines d’hommes et garçons yézidis dans les plaines de Ninive en août dernier. Dans de nombreux villages yézidis, la population a été regroupée. Les hommes et garçons de plus de 14 ans ont été séparés des femmes et des filles. Les hommes ont été emmenés plus loin et abattus par l’EI, tandis que les femmes étaient enlevées comme "butin de guerre".
Certaines des femmes et des filles yézidies qui se sont ensuite échappées ont décrit avoir été ouvertement vendues ou remises "en cadeau" à des membres de l’EI. Des témoins ont entendu des filles, d’à peine six et neuf ans, appeler à l’aide alors qu’elles se faisaient violer dans une maison utilisée par des combattants de l’EI.
Un témoin a décrit deux membres de l’EI assis en train de rire, alors que deux jeunes filles étaient violées dans la pièce voisine. Une femme enceinte, violée à plusieurs reprises par un "docteur" de l’EI pendant deux mois et demi, a déclaré qu’il s’asseyait de manière intentionnelle sur son ventre. Il lui a dit que "ce bébé devrait mourir car c’est un infidèle. Je peux faire un enfant musulman".
Des garçons de huit à 15 ans ont déclaré aux enquêteurs avoir été séparés de leurs mères et envoyés en Irak et en Syrie. Ils ont été contraints de se convertir à l’islam et soumis à un entraînement religieux et militaire, apprenant notamment à tirer avec des armes et des roquettes.
Ils ont été forcés de regarder des vidéos de décapitation. Un enfant s’est entendu dire: "C’est votre initiation au djihad... tu es un garçon de l’Etat islamique désormais", peut-on lire dans le rapport de l'ONU.
Les enquêteurs indiquent aussi avoir reçu des informations selon lesquelles des forces de sécurité irakiennes et des milices associées ont commis de graves violations des droits humains lors de leurs opérations de contre-offensive contre l'EI. Ils pourraient aussi avoir commis des crimes de guerre.
Le rapport met aussi en avant le fait que depuis la chute de Mossoul en juin dernier, la distinction entre les forces gouvernementales irakiennes régulières et irrégulières est devenue de plus en plus floue. Il suggère que, bien que des informations supplémentaires sur le lien entre les milices et le gouvernement soient nécessaires, des incidents indiquent, à tout le moins, l’incapacité du gouvernement à protéger les personnes sous sa juridiction.
L'ONU exhorte Bagdad à devenir partie au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI). Il demande au Conseil des droits de l’homme d’exhorter le Conseil de sécurité de l’ONU à porter la situation en Irak devant la CPI.
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