De nouvelles violences ayant fait au moins un mort ont éclaté jeudi à Bujumbura, juste après l'arrivée d'une délégation du Conseil de sécurité de l'ONU dans la capitale du Burundi. Elle est venue s'entretenir avec le gouvernement et tenter de faire baisser la tension.
Plusieurs centaines de manifestants pro-gouvernementaux ont accueilli fraîchement les diplomates, qui veulent pousser le gouvernement à ouvrir des pourparlers sérieux avec l'opposition et à accepter l'intervention d'une force africaine de paix dans le pays. "Arrêtez d'interférer dans les affaires burundaises", "un génocide n'arrivera pas", pouvait-on lire sur plusieurs pancartes.
C'est la deuxième visite des 15 ambassadeurs, conduits par l'Américaine Samantha Power ainsi que des diplomates français et angolais, en moins d'un an dans ce petit pays d'Afrique des Grands Lacs, plongé depuis avril 2015 dans une grave crise qui menace de dégénérer en guerre civile, voire en génocide.
Peu après l'arrivée des diplomates, entre 18h30 (17h30 en Suisse) et 20h00, plusieurs explosions et des tirs ont été entendus dans plusieurs quartiers de la capitale, et un adolescent a été tué par la police dans le quartier de Mutakura (nord-est), selon des témoins et une source administrative. Un deuxième a été blessé par les tirs des forces de l'ordre au même endroit.
Ces violences meurtrières sont devenues régulières à Bujumbura depuis le début de la crise politique, en avril 2015, lorsque le président Pierre Nkurunziza a annoncé sa candidature pour un troisième mandat controversé. Il a été réélu en juillet.
L'opposition dénonce une violation de la Constitution et des accords de paix d'Arusha qui avaient mis fin à la longue guerre civile (1993-2006) et qui régissaient le partage du pouvoir.
Une rébellion armée s'est constituée en décembre, les Forces républicaines du Burundi (Forebu). Elle a annoncé jeudi, quelques heures avant l'arrivée des diplomates onusiens, placer à sa tête le général Godefroid Niyombare, ancien chef d'état-major de l'armée burundaise, puis patron du Service national de renseignement.
C'est lui qui avait dirigé le putsch manqué de mai 2015 contre le président Nkurunziza, avant de prendre la fuite.
Dans l'ensemble du pays, les violences ont déjà fait plus de 400 morts et contraint à l'exil plus de 200'000 personnes, selon l'ONU. L'ONU a dénoncé la semaine dernière l'existence de massacres ethniques, de charniers avec une centaine de cadavres et de viols collectifs commis par les forces de sécurité.
Lors d'une réunion prévue vendredi, les diplomates onusiens espèrent convaincre le président Nkurunziza d'accepter le déploiement de 5000 soldats africains dans le cadre d'une Mission africaine de prévention et de protection au Burundi (Maprobu). Jusque-là, le gouvernement burundais a refusé, parlant de "force d'invasion".
Depuis Addis Abeba, la présidente de la Commission de l'Union africaine (UA) Nkosazana Dlamini-Zuma a émis "l'ardent espoir que la visite du Conseil de sécurité contribuera à la réalisation des deux objectifs fondamentaux et complémentaires que sont le déploiement rapide de la Maprobu et la relance sans délai du dialogue interburundais" sous l'égide du président ougandais Yoweri Museveni.
La date limite pour que le Burundi accepte le déploiement de la Maprobu est passée depuis longtemps, mais l'UA n'a pris aucune mesure.
Les ambassadeurs ont rencontré à Bujumbura deux anciens présidents burundais, Jean-Baptiste Bagaza (1976-1987) et Domitien Ndayizeye (2003-2005). Tous deux ont plaidé jeudi pour l'envoi de la force africaine et enjoint le Conseil de sécurité de l'ONU d'agir. "Cette force (la Maprobu), nous en avons besoin", a déclaré M. Ndayizeye, au pouvoir de 2003 à 2005.
Le Conseil doit "s'impliquer pleinement sinon nous risquons un autre Rwanda", a pour sa part mis en garde M. Bagaza (1976-1987). "Arrêtez cette hémorragie au Burundi qui est en train de faire disparaître notre jeunesse", a-t-il ajouté
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