Les dirigeants des pays du G5 Sahel, en présence du président français Emmanuel Macron, ont acté dimanche à Bamako la constitution d'une force antijihadiste conjointe et débloqué des fonds pour commencer son déploiement en septembre-octobre.
Réunis au sommet, les présidents Ibrahim Boubacar Keïta (Mali), Idriss Déby Itno (Tchad), Mohamed Ould Abdelaziz (Mauritanie), Roch Marc Christian Kaboré (Burkina Faso), et Mahamadou Issoufou (Niger) se sont engagés à une contribution de 10 millions d'euros chacun, qui s'ajouteront aux 50 millions promis par l'Union européenne.
De quoi amorcer le financement d'une force qui devrait coûter 423 millions d'euros, a indiqué le président malien lors d'une conférence de presse avec son homologue français au terme du sommet.
"Il y a urgence, parce que ceux qui sont en face n'attendent pas", a expliqué M. Keïta, en référence aux jihadistes.
"Pas besoin de réunir tous les financements pour commencer", a renchéri M. Macron, qui a annoncé une aide matérielle et logistique française équivalente à 8 millions d'euros d'ici à la fin de l'année, avec notamment 70 véhicules tactiques et du matériel de transmission et de protection.
Le président français a souhaité une mise en place du commandement fin août, ajoutant : "L'important c'est que cette force conjointe soit pleinement opérationnelle à l'automne, avec les premiers financements débloqués (...) et qu'elle ait ses premiers résultats".
Face à la dégradation de la situation dans le centre du Mali, limitrophe du Burkina Faso et du Niger, gagnés à leur tour par les violences jihadistes, le G5 avait réactivé, lors d'un sommet en février, à Bamako, le projet de cette force.
Déployée dans un premier temps aux confins du Mali, du Burkina Faso et du Niger, avec un effectif initial de 5.000 hommes, basée à Sévaré (centre du Mali), elle s'ajoutera à l'opération française Barkhane qui traque les jihadistes dans le Sahel et à la Mission de l'ONU au Mali (Minusma).
Pour compléter les fonds nécessaires, une conférence des donateurs est prévue prochainement, avec selon Paris un apport programmé de l'Allemagne, qui participe déjà en force à la Minusma et à la mission européenne de formation de l'armée malienne.
Mais le président français a enjoint le G5 Sahel de démontrer l'efficacité de cette force pour convaincre les donateurs, alors que le Conseil de sécurité de l'ONU a salué par une résolution le 21 juin ce déploiement, sans lui délivrer ni mandat ni fonds.
"Ce sera à vous et à vos armées de convaincre que le G5 peut être efficace, dans le respect des conventions humanitaires, pour convaincre nos partenaires", a-t-il prévenu.
Il a aussi pressé les dirigeants du G5 de mener "des réformes institutionnelles et des efforts de gouvernance, appelés par vos populations".
A M. Keïta, il a redemandé la "pleine mise en oeuvre de l'accord de paix" de mai-juin 2015, censé isoler les jihadistes, notamment par une décentralisation en faveur des régions du Nord.
Dans un nouveau geste de défi aux dirigeants du G5, la principale alliance jihadiste du Sahel, liée à Al-Qaïda, a diffusé samedi une vidéo montrant six étrangers enlevés au Mali et au Burkina Faso entre 2011 et 2017, dont une Française.
"Ces gens ne sont rien, ce sont des terroristes, des voyous et des assassins", a réagi M. Macron, tout en se réjouissant d'avoir "pour la première fois depuis des mois une trace de vie pour Sophie Pétronin", l'otage française, enlevée en décembre.
Concernant les préoccupations financières exprimées la semaine dernière par le président tchadien, dont le pays participe déjà aux opérations de la Minusma et de la force multinationale contre le groupe islamiste nigérian Boko Haram, il a été rasséréné par les discussions du sommet, seon MM. Keïta et Macron.
Le président français a aussi annoncé une augmentation des aides au développement pour le Sahel, via l'Agence française de développement, à raison de 200 millions d'euros sur 5 ans.
Toujours sur le volet développement, M. Macron a ajouté avoir "bon espoir que le 13 juillet", le Conseil des ministres franco-allemand à Paris serait l'occasion d'annoncer une aide allemande au Sahel.
Sous le label d'"alliance pour le Sahel", il espère mobiliser d'autres donateurs, notamment des institutions internationales.
Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de groupes jihadistes liés à Al-Qaïda, en grande partie chassés par une intervention militaire internationale lancée en 2013 à l'initiative de la France.
Mais des zones entières échappent au contrôle des forces maliennes, françaises et de l'ONU, régulièrement visées par des attaques, malgré l'accord de paix.
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