Le premier ministre mauricien, sir Anerood Jugnauth, vétéran de la scène politique, a annoncé samedi qu'il présenterait sa démission lundi et devrait voir son fils Pravind lui succéder, mais cette transition pourrait provoquer des turbulences politiques.
"Je soumettrai ma démission lundi à la présidente de la République. Je cèderai ma place à un leader plus jeune et plus dynamique, Pravind Jugnauth, qui dispose d'une majorité au Parlement", a-t-il déclaré dans un message télévisé.
Sir Anerood, 86 ans, est un cacique de la vie politique mauricienne. Il était Premier ministre depuis décembre 2014, après avoir déjà occupé ce poste entre 1982 et 1995, puis entre 2000 et 2003. Il a aussi été président de la République entre 2003 et 2012.
La démission de ce dirigeant de centre-droit pourrait provoquer des remous dans cette démocratie stable depuis son indépendance du Royaume-Uni en 1968.
Son fils Pravind est le chef du Mouvement socialiste mauricien (MSM), le principal parti de la coalition au pouvoir, et est ainsi au regard de la Constitution appelé à lui succéder.
Mais la transition pourrait ne pas se dérouler en douceur, la légitimité de Pravind Jugnauth, 55 ans et actuel ministre des Finances, étant contestée par l'opposition.
La démission de sir Anerood, qui a précisé qu'il entendait servir dans le prochain gouvernement, n'est pas une réelle surprise. Il avait indiqué en septembre qu'il pourrait quitter son poste avant la fin de son mandat prévu en 2019.
Depuis la question de sa succession donnait lieu à des débats passionnés dans cet archipel de 1,3 million d'habitants.
Nombre de Mauriciens estiment que le poste de Premier ministre ne peut se transmettre de père en fils, sans en passer par des élections.
Aux termes de la Constitution, la présidente Amenah Gurib Fakim doit, après consultations, nommer le député susceptible de réunir une majorité parlementaire comme Premier ministre.
Dans l'éventualité où ce dernier ne parviendrait pas à obtenir la majorité au Parlement, la présidente devrait dissoudre l'Assemblée nationale et convoquer de nouvelles élections générales.
La situation de Pravind Jugnauth est d'autant plus précaire que la coalition au pouvoir a perdu en décembre quatre ministres, membres du Parti mauricien social démocrate (PMSD), qui ont rejoint l'opposition pour protester contre un projet de réforme constitutionnelle.
La coalition ne dispose plus que de 41 députés sur les 69 siégeant à l'Assemblée nationale et l'opposition devrait en profiter pour faire vigoureusement entendre sa voix.
"J'invite les partis de l'opposition à conjuguer leurs efforts pour protester contre la passation du pouvoir par sir Anerood Jugnauth à son fils", a ainsi réagi le chef du PMSD et leader de l'opposition, Xavier-Luc Duval.
Le chef du Parti travailliste, l'ancien Premier ministre Navin Ramgoolam, s'est aussi rangé à cet avis. "Un front commun de l'opposition est nécessaire pour contrer l'arrogance" de la famille Jugnauth, a-t-il observé.
Le dernier grand dirigeant d'opposition, l'ancien Premier ministre et chef du Mouvement militant mauricien (MMM) Paul Bérenger, s'était par avance prononcé en faveur d'une plateforme commune de l'opposition pour empêcher cette passation de pouvoir.
La démocratie parlementaire mauricienne est fondée sur le système en vigueur en Grande Bretagne, qui a colonisé Maurice entre 1810 et 1968, lorsque l'île a accédé à l'indépendance.
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