L'ONU et la République démocratique du Congo (RDC) se sont livrés à une passe d'armes au Conseil de sécurité jeudi, le chef de la diplomatie congolaise réclamant un départ rapide des Casques bleus alors que le patron de la mission de l'ONU plaidait pour un retrait progressif.
Pour le ministre congolais des Affaires étrangères Raymond Tshibanda, le moment est venu (pour la RDC) d'assumer pleinement ses responsabilités quant à sa sécurité. Il a demandé fermement au Conseil de respecter cette aspiration légitime.
Le ministre a fait valoir des progrès politiques et économiques accomplis par son gouvernement et des avancées importantes des forces gouvernementales contre les rebelles hutu rwandais des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) dans l'est du pays. Il a évoqué un Etat qui fonctionne et dont l'autorité s'exerce effectivement sur la quasi-totalité du territoire national.
Tout au plus, a-t-il reconnu, il reste encore quelques poches d'insécurité entretenues par des terroristes ougandais dans et autour de Beni (Nord-Kivu) et par les FDLR à certains endroits bien localisés du Nord et du Sud Kivu. Partout ailleurs, sur le territoire national, la paix et la sécurité règnent, a-t-il ajouté.
Des affirmations battues en brèche par le chef de la Monusco, Martin Kobler, qui a souligné que la situation générale de sécurité reste instable et que beaucoup vivent toujours dans la peur dans l'est du pays.
La Monusco ne restera pas éternellement en RDC, a-t-il expliqué, mais il y a encore des efforts à faire pour ramener la menace des groupes armés et les violences contre les civils à un niveau gérable par l'Etat congolais.
Le départ de la Monusco doit être lié aux résultats obtenus et à l'amélioration concrète de la situation sur le terrain, a-t-il martelé.
Selon des diplomates, le Conseil envisage de réduire de 2.000 les effectifs de la Monusco (près de 20.000 hommes) alors que Kinshasa réclame le retrait de 6.000 Casques bleus.
M. Kobler a aussi critiqué l'arrestation il y a quelques jours de plus de 40 acteurs de la société civile. Laisser un espace politique à la société civile est une condition préalable pour des élections crédibles, a-t-il souligné.
Les deux hommes sont revenus sur la nomination par Kinshasa de deux généraux coupables d'abus selon l'ONU, qui a amené la Monusco à se retirer de l'offensive contre les FDLR.
Nous ne voulons pas devoir choisir entre combattre les FDLR et soutenir les droits de l'homme, a lancé M. Kobler. M. Tshibanda a affirmé que Kinshasa n'avait pas été averti à l'avance des soupçons contre les deux officiers qui avaient déjà travaillé avec l'ONU.
De plus, a-t-il rétorqué, la RDC tient à garder une totale autonomie sur le plan de la nomination de ses cadres civils et militaires.
M. Kobler a cependant offert à M. Tshibanda de réenclencher la coopération tandis que le ministre se disait prêt à engager un dialogue stratégique pour sortir de l'impasse.
A l'issue de consultations à huis clos au Conseil, l'ambassadeur français François Delattre, qui le préside, a indiqué que le 15 pays membres avaient discuté de la nécessité de reprendre la coopération entre le gouvernement congolais et la Monusco dès que possible concernant les opérations contre les FDLR.
Mais le Conseil, a-t-il dit, veut aussi que les élections prévues en 2016 soient organisées de manière pacifique et démocratique, dans le respect de la constitution et du calendrier électoral. C'est à cette condition que la Monusco en soutiendra l'organisation, a ajouté l'ambassadeur.
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