Plus de 400 millions d’électeurs sont appelés aux urnes dans les 28 pays de l’UE pour élire un nouveau Parlement, rouage essentiel dans l’élaboration et l’adoption des lois européennes. Il comptera 751 élus dont 73 Britanniques, car le Royaume-Uni n’a pas encore divorcé de l’UE. Ironie de l’histoire, les Britanniques seront les premiers à voter le 23 mai, et les sondages prédisent une victoire du parti du Brexit, anti-européen.
Souvent vues par les politologues comme une occasion de sanctionner le pouvoir en place au niveau national, les élections européennes sont traditionnellement marquées par une forte abstention . La tendance pourrait toutefois s’inverser en 2019. 56% des Allemands disent s’intéresser aux européennes, selon un sondage pour la ZDF, et la participation en Allemagne pourrait être de 60% contre 48% en 2014. Le vote des jeunes, très mobilisés pour les enjeux environnementaux, sera particulièrement suivi cette année.
Le choix de personnalités quasi-inconnues comme chefs de file a pesé sur la campagne. Et l’hostilité affichée par les chefs d’Etat et de gouvernement pour les prétendants nommés par les familles politiques du Parlement pour présider la commission à Bruxelles a ajouté à la confusion. Dans certains Etats, notamment en France, en Italie et en Espagne, le scrutin risque d’être un vote sanction.
Extrême droite europhobe, conservateurs et populistes anti-système espèrent renouveler leur scores de 2014, voire les augmenter. Les projections annoncent 173 élus sous les couleurs de ces formations. Certains de leurs dirigeants parlent d’un « exploit historique ». Les enquêtes sur leurs financements pourraient toutefois contrarier leurs ambitions. Une révélation liée à cette question a contraint samedi à la démission le vice-chancelier autrichien Heinz-Christian Strache, membre du parti d’extrême droite FPÖ. Reste à savoir si les appels à leur barrer la route mobiliseront les électeurs des partis traditionnels.
Le vote devrait sonner la fin de la suprématie des deux grandes familles, le Parti populaire européen (PPE) à droite et les Socialistes à gauche. Chacune va perdre au moins une trentaine d’élus, selon les sondages. Mais elles resteront incontournables pour composer les majorités nécessaires à l’adoption des lois, souligne le porte-parole du Parlement européen Jaume Duch.
Les Libéraux espèrent devenir la troisième force avec le renfort des élus de la majorité présidentielle française (liste Renaissance) et des Espagnols de Ciudadanos. Si le groupe parvient à imposer une discipline de vote à ses membres, ce qui s’est avéré impossible pendant la dernière législature, il pourra compter au sein de l’Assemblée.
Les dirigeants de l’UE se réuniront en sommet le 28 mai, deux jours après le verdict des urnes, pour lancer le grand marchandage des nominations. Cinq présidences sont en jeu: la Commission, le Conseil, le Parlement, le service diplomatique et la Banque centrale européenne (BCE). Ils devront désigner au moins une femme et respecter les équilibres entre grands et petits pays, entre le Nord et le Sud et entre l’Ouest et l’Est.
La mésentente entre Angela Merkel et Emmanuel Macron risque de rendre l’exercice très difficile. « Nous devons éviter le compromis sur le moins bon candidat », a soutenu le président français, opposé à la désignation du candidat du PPE soutenu par Angela Merkel, l’Allemand Manfred Weber.
Le président du Conseil, le Polonais Donald Tusk, est attendu lundi à Paris pour rencontrer M. Macron. Il a pour mission de trouver les principales pièces de l’échiquier pour le sommet des 20 et 21 juin.
Marches pour le climat, contestation sociale sur fond de crainte du déclassement et de perte du pouvoir d’achat, peur de l’immigration et du risque terroriste. Tous les sondages pointent les mêmes priorités. Les Européens attendent de leurs décideurs des actes pour les protéger contre les effets négatifs de la mondialisation, les attitudes belliqueuses d’autres grandes puissances et les conséquences des catastrophes liées au réchauffement du climat.