Les milieux économiques britanniques se montraient à peine soulagés jeudi par le report du Brexit qui permet d'éviter l'imminence d'une sortie sans accord et s'inquiétaient surtout du maintien d'une incertitude nuisible à leurs affaires.
"Ce délai signifie que l'imminence d'une crise économique a été évitée, mais il doit marquer un nouveau départ", a réagi sur son compte Twitter Carolyn Fairbairn, directrice générale de la puissante organisation patronale CBI.
Pour Adam Marhall, directeur général des chambres de commerce britanniques, "les entreprises vont être soulagées mais leur frustration est palpable concernant ce processus politique sans fin".
Le report jusqu'au 31 octobre du Brexit, sur lequel se sont mis d'accord dans la nuit l'UE et le Royaume-Uni, écarte provisoirement le spectre d'une sortie sans accord, un scénario redouté par les milieux d'affaires et qui pourrait entraîner un sévère choc économique.
Le soulagement est de mise puisque la date butoir pour le Brexit était jusqu'à présent fixé à vendredi, sans que la Première ministre Theresa May n'ait pu jusque-là faire valider par le Parlement l'accord négocié avec Bruxelles, ce qui exposait donc le pays à un divorce abrupt.
"Pour le bien des emplois et des personnes à travers le pays, tous les dirigeants politiques doivent utiliser cette période au mieux. Une sincère collaboration transpartisane est nécessaire pour mettre fin à ce chaos", selon Carolyn Fairbairn.
Cette période d'incertitude pèse sur l'activité économique, alimentant la prudence des ménages et surtout celle des entreprises enclines à retarder les décisions d'investissement faute d'y voir clair sur la future relation entre Bruxelles et Londres.
De nombreuses sociétés ont augmenté leurs stocks pour se prémunir contre des perturbations des échanges commerciaux et de grands groupes internationaux s'interrogent sur leur présence dans le pays.
Dans une démarche rarissime, le patronat et les syndicats britanniques avaient même supplié fin mars Theresa May de changer d'approche sur le Brexit, alertant sur une situation d'"urgence nationale".
Le secteur automobile figure parmi les plus inquiets de ce débat sans fin autour du Brexit, puisqu'il a prospéré depuis des dizaines d'années grâce aux échanges sans entraves avec le continent.
"Même si nous avons évité un +no deal+ vendredi, il est totalement inacceptable qu'après plus de deux ans de négociations, le secteur ne sache pas quelle sera la relation avec l'UE dans les semaines et mois à venir", se lamente Mike Hawes, directeur général de l'association professionnelle SMMT.
De même, le lobby financier de la City de Londres, qui accueille de nombreux groupes internationaux, s'inquiète de l'absence de solution sur la sortie de l'UE.
"Jour après jour, l'incertitude persiste tout comme la menace de voir davantage d'entreprises choisir de déplacer des emplois et des activités en dehors du Royaume-Uni", souligne Catherine McGuinness, chef politique du quartier des affaires de Londres.
Les marchés financiers étaient, de leur côté, peu surpris par le report du Brexit, qu'ils avaient déjà anticipé. La livre sterling, qui avait un peu progressé dans la nuit face au dollar, reculait légèrement dans la matinée.
"Même si la livre a ignoré les développements de la nuit dernière, la perspective de six mois de plus d'incertitude va probablement se faire sentir sur l'économie britannique", prévient Jasper Lawler, analyste de London Capital Group.
"La résistance de la livre que nous avons observée pourrait ne pas durer", selon lui.
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