La Suède semblait résister dimanche soir à la poussée de fièvre nationaliste suscitée par la crise migratoire en Europe: l'extrême droite progresse, revendiquant une "énorme influence" sur la politique du pays scandinave, sans cependant se hisser au niveau espéré, tandis que droite et gauche étaient à égalité parfaite.
Le chef du gouvernement est traditionnellement le dirigeant du parti ayant obtenu le plus grand nombre de voix mais le nouveau paysage politique fragmenté de la Suède rend toute conjecture particulièrement hasardeuse.
Ni le bloc "rouge-vert" sortant ni l'opposition du centre et de la droite n'ayant obtenu plus de 50% des 349 mandats en jeu au Riksdag, le parlement suédois, de longues tractations s'annoncent de part et d'autre dans les semaines à venir.
Les résultats encore provisoires donnaient les deux camps à égalité parfaite, à 143 mandats chacun.
Le Parti social-démocrate du Premier ministre Stefan Löfven perd près de trois points par rapport aux législatives de 2014, tombant à 28,3% des suffrages, selon des résultats portant sur 85% des circonscriptions.
Critiqué tout azimuts sur son bilan migratoire et social, Stefan Löfven apparaît personnellement fragilisé par quatre années d'un mandat tumultueux qui a vu l'arrivée en 2015 de 160.000 demandeurs d'asile, un record en Europe rapporté au nombre d'habitants.
Le scrutin s'avère également décevant pour les conservateurs d'Ulf Kristersson qui perdent 3,5 points en quatre ans, atteignant 19,8% des voix.
De son côté l'extrême droite, alors qu'elle espérait renverser la table, est loin de réaliser la percée annoncée par son président, Jimmie Åkesson, qui disait encore dimanche miser sur entre "20 et 30%" des voix.
Les Démocrates de Suède (SD), formation anti-immigration, nationaliste et europhobe obtiendrait 17,7% des votes, après 12,9% en 2014, échouant à devenir le deuxième plus grand parti de Suède.
Mais s'ils progressent moins qu'entre 2010 et 2014, les Démocrates de Suède se sont durablement imposés dans le débat politique et émergent en faiseur de rois entre les deux blocs.
"Nous sommes les grands gagnants de cette élection (...). Nous allons exercer une véritable influence sur la politique suédoise", a lancé un Jimmie Åkesson triomphant à ses partisans réunis dans un restaurant de la capitale.
"Je suis prêt à parler, à coopérer, à négocier avec tous les partis, mais je veux surtout inviter Ulf Kristersson à négocier", a-t-il ajouté.
L'opposition est déterminée à déloger les sociaux-démocrates mais pour construire une majorité solide, il lui faudrait dynamiter le cordon sanitaire qui, jusqu'ici, tenait les Démocrates de Suède à distance d'une influence politique directe.
Un pas qui pourrait s'avérer risqué, tant centristes et libéraux ont dit et redit leur refus d'un "pacte avec le diable". Et sept sympathisants conservateurs sur dix ne veulent pas entendre parler d'une main tendue à l'extrême droite.
Alors que le Premier ministre social-démocrate Stefan Löfven présentait ces législatives comme un "référendum pour l'Etat-providence", l'extrême droite en avait fait un plébiscite contre sa politique migratoire.
En septembre 2015, il justifiait l'ouverture aux réfugiés de Syrie, d'Irak ou d'Afghanistan au nom d'"une Europe qui n'édifie pas de murs". Deux mois plus tard, il annonçait un tour de vis migratoire et le rétablissement des contrôles aux frontières.
Une volte-face insuffisante pour l'extrême droite. A l'image du parti Alternative pour l'Allemagne (AfD), les Démocrates de Suède dénoncent l'immigration comme une menace "culturelle" et réclament le renvoi de centaines de milliers de personnes.
Ancien métallo de 61 ans, le Premier ministre a perdu des électeurs sur sa gauche et sur sa droite, les uns lui reprochant d'avoir laissé grand ouvertes les portes du pays aux demandeurs d'asile, les autres de les avoir aussitôt refermées.
Et ses chances de reformer une coalition - de toute façon minoritaire - sont d'autant plus compromises que la poussée du Parti de gauche qui le soutient au parlement n'a pas compensé le recul des écologistes - membres du gouvernement - qui frôlent le seuil des 4% requis pour envoyer des députés sur les bancs du Riksdag, le parlement suédois.
En l'absence d'une claire légitimité issue des urnes, "nous sommes prêts à collaborer au-delà des blocs", à l'exception de l'extrême droite, s'est avancé le patron des sociaux-démocrates au parlement, Anders Ygeman.
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