Vladimir Poutine s'est résolu jeudi à reporter le défilé militaire annuel du 9 mai célébrant la victoire sur l'Allemagne nazie en raison du Covid-19, le deuxième évènement majeur auquel le Kremlin a dû renoncer.
La décision d'ajourner sine die cette parade intervient en effet trois semaines après celle de repousser sa réforme constitutionnelle annoncée renforçant certaines prérogatives du chef de l'Etat et surtout accordant à l'homme fort de la Russie la possibilité de se représenter en 2024 à la présidentielle et de rester au pouvoir en théorie jusqu'en 2036.
Depuis des semaines, le Kremlin hésitait à maintenir le grand défilé militaire sur la Place Rouge à Moscou marquant les 75 ans de la fin de la Deuxième Guerre mondiale et qui devait illustrer la puissance russe sur la scène internationale.
Des dizaines de dignitaires étrangers devaient y participer.
"Les risques liés à l'épidémie, dont le pic ne sera pas encore atteint (le 9 mai), sont encore extrêmement élevés et cela ne me donne pas le droit de lancer les préparatifs en vue de la parade et des autres événements de masse", a déclaré Vladimir Poutine au cours d'une réunion télévisée avec son Conseil de sécurité.
"Nous sommes devant un choix difficile : la date du 9 mai est pour nous sacrée, mais la vie de chaque personne n'a pas de prix", a poursuivi le président russe, ajoutant que toutes les célébrations seront organisées plus tard cette année, lorsque la menace sera écartée.
Cette mesure fait suite à un appel d'associations d'anciens combattants mercredi à reporter le défilé auquel 15.000 soldats devaient prendre part, au nom de la sécurité sanitaire du public.
La décision a été prise à un moment où, depuis le début de la semaine surtout, la Russie bat tous les jours ses records de contaminations quotidiennes, en particulier à Moscou, et où le pic de la propagation ne semble pas atteint. Jeudi, ce pays avait recensé 27.938 malades et 232 morts.
M. Poutine a depuis des années placé l'importance du rôle de l'URSS dans la défaite nazie au coeur d'un discours de puissance et de prestige russes. Il est aussi au coeur d'une bataille autour de la mémoire et de l'histoire avec ses adversaires géopolitiques occidentaux.
La Russie n'a eu cesse d'accuser Européens et Américains de minimiser le rôle des Soviétiques dans la défaite nazie, malgré ses 27 millions de morts selon les chiffres officiels. Moscou y voit la preuve d'une politique russophobe et de falsification historique.
M. Poutine a aussi accusé Varsovie de complicité avec Hitler et aussi relativisé l'importance du pacte germano-soviétique de 1939 dont des clauses secrètes avaient organisé le partage de la Pologne entre l'URSS et l'Allemagne, ouvrant la voie à l'invasion nazie.
Ces positionnements de plus en plus marqués interviennent en outre dans le cadre d'une politique étrangère toujours plus offensive qui a signifié ces dernières années un retour triomphant de la Russie sur la scène internationale.
Selon les Occidentaux, il s'agit d'un retour belliqueux et agressif qui s'est fait notamment au mépris du droit international, avec l'annexion de la Crimée ukrainienne en 2014, au prix d'exactions et de bombardements meurtriers en Syrie et d'une guerre civile instiguée par Moscou dans l'est de l'Ukraine.
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