Angela Merkel se retrouve confrontée à sa plus grave crise politique en 12 ans de pouvoir après l'échec dimanche soir de négociations pour former un gouvernement en Allemagne, qui pourrait à terme signer la fin de sa carrière politique.
Faute d'alternative, la première puissance économique européenne se prépare à plusieurs semaines ou mois de paralysie politique, sur le plan national comme en Europe.
Au final, les Allemands pourraient devoir retourner aux urnes en début d'année prochaine, alors qu'ils viennent fin septembre d'élire leurs députés.
Au pouvoir depuis 2005, la chancelière a certes remporté ces législatives mais avec le pire score depuis 1949 pour son parti conservateur, dans un contexte de percée de l'extrême droite et de mécontentement face à l'arrivée de plus d’un million de migrants.
Cette situation, ajoutée au refus des sociaux-démocrates de continuer à gouverner avec elle, la prive de majorité évidente au Bundestag.
Depuis plus d'un mois, elle négociait du coup une coalition sur le papier contre nature - et encore jamais expérimentée au plan national - entre son parti conservateur (CDU-CSU), les Libéraux, et les Ecologistes.
Après plus d'un mois de tractations laborieuses et un dernier week-end marathon, les Libéraux ont jeté l'éponge dimanche soir en jugeant les positions des uns et des autres trop antagonistes.
"Il est préférable de ne pas gouverner que de mal gouverner", a déclaré à la presse à Berlin le président du FDP, Christian Lindner.
M. Lindner a jugé qu'il n'y avait pas de "positions communes et de confiance mutuelle" suffisantes pour envisager un gouvernement de ce type pendant quatre ans.
La chancelière a "déploré" cette décision, estimant qu'un accord aurait été possible avec un peu plus de volonté de compromis.
Dans l'immédiat, elle doit continuer à diriger, comme elle le fait depuis un mois, un gouvernement qui se contente de gérer les affaires courantes et ne peut donc prendre aucune décision majeure.
Une mauvaise nouvelle en particulier pour les partenaires européens de l'Allemagne, la France en particulier, dont le président Emmanuel Macron a présenté en septembre des propositions de relance de l'Union européenne et de la zone euro.
Angela Merkel a dans le même temps promis de "tout faire pour que ce pays soit bien dirigé au cours des semaines difficiles à venir".
Au bout du compte c'est principalement sur la question de l'immigration et des suites de la politique généreuse d'accueil des demandeurs d'asile de la chancelière que les tractations ont buté.
Les partis n'ont pu s'entendre sur un plafonnement du nombre de demandeurs d'asile, ni sur la question de savoir si tout ou partie seulement des réfugiés devaient avoir droit au regroupement familial en Allemagne.
Les questions environnementales ont constitué l'autre grand sujet de discorde entre les Verts et les autres partis.
Quelle issue désormais pour le pays? La chancelière a dit vouloir consulter lundi le président allemand, Frank-Walter Steinmeier, à qui la constitution confère un rôle clé pour les choix à venir.
La constitution ne fixant pas de limite pour la formation d'un gouvernement, Angela Merkel peut en théorie, après une pause, faire une nouvelle tentative de coalition avec les quatre partis. Mais compte tenu des divisions, la tâche s'annonce rude.
Elle peut aussi essayer de convaincre les sociaux-démocrates de revenir sur leur refus de gouverner avec elle. Mais le SPD ne cesse de réitérer son souhait de faire une cure d'opposition.
La chancelière a pour le reste rejeté l'idée de se faire élire pour un quatrième mandat à la tête d'un gouvernement minoritaire.
Reste donc l'issue la plus probable: de nouvelles élections. Et dans un pareil cas de figure, Angela Merkel aura toutes les peines à convaincre son parti de mener la bataille.
L'échec gouvernemental de dimanche est aussi son échec personnel.
Il intervient alors qu'elle est sortie déjà fragilisée des élections législatives après le score décevant de son parti, où son cap centriste est de plus en plus contesté par l'aile droite du mouvement.
L'échec de la coalition signifie "aussi sa fin" politique, a estimé le politologue allemand Frank Tecker sur la chaîne de télévision parlementaire nationale, Phoenix.
Et selon un sondage, plus de 60% des Allemands pensent qu'elle ne pourra plus rester en poste désormais.
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