Après le Brexit, la BCE va opter pour un statu quo

03/09/2016
Après le Brexit, la BCE va opter pour un statu quo

Le siège de la BCE à Francfort

Face à la résistance de l'économie après le choc du Brexit, la Banque centrale européenne (BCE) va sans doute opter pour un statu quo monétaire cette semaine, prédisent des analystes.

Le conseil des gouverneurs, organe de décision de l'institution de Francfort, tiendra jeudi sa deuxième réunion depuis le vote de la Grande-Bretagne en faveur d'une sortie de l'Union européenne fin juin.

En juillet, il avait laissé inchangé le principal taux directeur à 0%, son plus bas historique. Le taux de prêt marginal était resté à 0,25% et le taux de dépôt à -0,40%.

Le président Mario Draghi avait alors souligné "la disponibilité, la volonté et l'aptitude" de la BCE à agir si nécessaire pour soutenir l'économie.

Mais le cataclysme post-Brexit tant redouté n'a pas, pour le moment, eu lieu. Et même si de nouvelles mesures seront à terme nécessaires pour relancer l'inflation désespérément basse (0,2% en août) voire faire barrage aux risques de déflation, la BCE peut encore se permettre d'attendre, jugent de nombreux économistes.

Après avoir misé sur un changement en septembre, "nous nous attendons maintenant à ce que la BCE n'agisse à nouveau qu'en décembre", indique ainsi Elga Bartsch, chez Morgan Stanley.

Les nouvelles prévisions de croissance et d'inflation, qui seront également annoncées jeudi, ne devraient selon elle subir que des "changements mineurs" comparé à juin dernier.

"Les effets du Brexit sont probablement moins importants que beaucoup l'ont redouté", abonde Ben May de Capital Economics. "Ce sera plus un choc politique qu'un choc économique", juge-t-il.

Les récentes déclarations de banquiers centraux pointent aussi en direction d'un statu quo.

Le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau, et membre du conseil de la BCE, a ainsi déclaré fin août que la priorité allait à la mise en oeuvre des vastes mesures prises en mars.

Dans l'espoir de stimuler crédit et croissance, la BCE avait sorti son "bazooka monétaire", annonçant une nouvelle baisse des taux, une extension du volume de son programme d'achats de dettes de 60 à 80 milliards d'euros par mois, des rachats d'obligations d'entreprises et de nouveaux prêts géants aux banques.

Les déclarations de Mario Draghi jeudi seront particulièrement scrutées en Allemagne, où le secteur bancaire se plaint désormais haut et fort de la politique trop accommodante à son goût de la BCE, qui entame leur rentabilité.

"Les banques ne sont pas les seules à souffrir, les conséquences sont fatales pour les épargnants et leur retraite", les taux d'intérêt sur leurs placements ayant fondu à vue d'oeil, s'est insurgé John Cryan, patron de la première banque allemande Deutsche Bank.

Et l'objectif même de cette politique -à savoir la relance du crédit, et par ricochet de l'activité industrielle et économique- est loin d'être rempli. "Avec les incertitudes persistantes, les entreprises réfrènent les investissements et demandent à peine plus de crédits", selon lui.

Pour Volker Wieland aussi, l'un des cinq "Sages", ces économistes renommés qui conseillent le gouvernement allemand, les politiques de taux bas de la BCE mais aussi la banque centrale américaine (Fed), "font de plus en plus partie du problème".

"Si les intérêts restent si faibles, les résultats (des banques) vont encore nettement se dégrader, en dépit des très bonnes conditions économiques en Allemagne", a de son côté prévenu Felix Hufeld, le président de la Bafin, gendarme allemand des marchés financiers.

Face à un marché de l'emploi dynamique, même si les chiffres du mois d'août ont déçu, la Fed a déjà fait savoir qu'elle se dirigeait vers un resserrement monétaire. Une perspective impensable pour le moment en Europe, confrontée au dilemme d'une inflation trop basse, selon les analystes.

"Une nouvelle dose de stimulus monétaire n'est qu'une question de temps", estime Marco Valli d'UniCredit, pour qui la première mesure que prendra la BCE sera probablement de prolonger son vaste programme de rachat d'obligations de six mois, jusqu'à septembre 2017.

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